"I'm walking alone on what seems to be my path... wonder where it goes..."

Je ne suis pas entièrement américaine. Certes, je suis née en Californie. Mais naître en bordure de route sur le siège arrière d'une voiture ne me qualifie pas de Californienne, selon moi. En fait, j'ai vécu la plus grande partie de ma vie à New York, dans le district de Manhattan. J'ai un sentiment d'appartenance à cet endroit, même si j'ai des origines coréennes.

Avec ce mouvement pour interner tous les «fous», j'ai été déclarée dangereuse à mes 21 ans. Je n'en ai pas la moindre idée du pourquoi. Peut-être c'est parce qu'ils ont vu qu'une folie se réveillait peu à peu à l'intérieur de moi? Peut-être c'est parce que de plus en plus j'avais envie d'assassiner Cody? Cet espèce d'homme qui vous ronge l'esprit, jour et nuit, où son regard perçant semble transpercer votre chair? J'avais une vie normale jusqu'à ce que je le croise. Il m'avait insulté. «Horrible femme», avait-il dit. Moi, horrible? Je suis belle. Magnifique même. Ces bestioles de l'Horreur restent loin de moi et me surveille toujours, mais jamais, je dis bien jamais, je les ai laissé m'approcher. Et la nuit, je voyais Cody. Dans chaque recoin, il se cachait. Ses yeux scintillaient d'une lueur d'insanité. Je me suis demandé pourquoi Ils ne l'internaient pas. Puis, il me suivait partout, tout le temps. Parfois, il y avait plusieurs Cody qui me zieutaient. J'en devenais dingue. Ça devait cesser. J'entendais toujours ces deux mots, ces cinq syllabes, ces 13 lettres me hanter dans mes oreilles. «Horrible femme» résonnait en écho, toujours en boucle. Pourquoi? QU'EST-CE QUE J'AI! Bon Dieu, qu'est-ce qui m'arrive? Il est là. Je ne veux pas que ce soit ça l'amour. C'est obsessif. Non. Que Cody soit mon obsession c'est n'importe quoi. Je le déteste. Comment je peux continuer à vivre normalement en sachant qu'il est là? NON!

J'avais l'impression de toujours sentir sa présence: dans la rue, dans mon appartement, dans ma chambre, dans ma douche... Puis, le 12 juillet est arrivé. À nouveau un scan. J'ai atteri à l'asile. Je suis internée. On ne m'a rien dit à propos du scan. Je suis certaine qu'ils m'ont vu l'assassiner. Cody. Il ne peut plus m'embêter. J'ai mon coin à moi ici. Il ne peut plus m'atteindre. Ces murs me protègent à présent de lui. HA HA HA! Pourquoi je ris? Parce que je suis seule. Ah, c'est vrai. Je n'ai pas croisé beaucoup de personnes depuis que je suis arrivée. J'essaie de rester à l'écart. Après tout, il paraît qu'il y a des meurtriers ou meurtriers à en devenir ici, au sous-sol. Comme moi. Hi hi. C'est bien de ne pas les voir. Ils doivent être affreux. Ces bestioles de l'Horreur doivent les avoir atteint. Moi, je les repousse toujours. Si je peux rester belle, ce sera déjà ce pas de franchi. C'est parfait de simplement sentir leur présence. Il n'y a pas beaucoup de joie ici. Mais, je ne suis pas seule. Tant qu'ils ne sont pas physiquement présent, je ne peux pas savoir à quoi ils ressemblent et c'est ce qui fait ma joie. Du moins, c'est bien: Parmi toutes ces âmes déchues et cette ambiance mortifiante, il y a au moins quelqu'un qui peut sourire: Moi.

Je suis peut-être trop optimiste, mais je ne vois pas ce qu'il y a de si grave ici. Peut-être si je me tais et fais la belle, je pourrai retourner à l'extérieur? Ah non. Mauvaise idée. C'est vrai qu'il y a Cody dehors. Il m'attend sûrement. Je reste sur mon lit, genoux repliés sur mon buste. Je tiens mes jambes. Il n'y a pas grand chose dans ma chambre. Si je peux qualifier un élément d'«objet», mais je sais que c'en n'est pas un, ce serait une coulisse coagulé sur le mur. Ça a du reflief. La lumière du néon l'éclaire et projète une ombre. Une longue ombre. On dirait que ça a une forme. Ça bouge. Une bestiole? L'ombre semble s'étirer en une main vers moi. Je recule sur mon lit. J'ai peur. Ça s'approche. Longe le mur sans bruit. Qu'est-ce que je peux faire pour l'éloigner. Non. Arrête d'approcher. Je panique. Je me mets à frapper le mur de mes deux poings. «VA-T'EN! FICHE LE CAMP SALETÉ D'OMBRE!» Je cris, frappe et frappe encore à l'aveuglette. Quand je commence à avoir mal aux jointures, je stoppe. Tout est silencieux, sauf pour ma respiration haletante. L'ombre est redevenu une fine ligne sage en dessous de la bosse du mur. Elle est repartie. Je l'ai fait partir. Ha. Ha ha. HA HA HA HA! Je me mets à rire fortement. Comment l'ombre pouvait se déplacer? HA HA! N'importe quoi. Je suis folle, voilà. Folle et belle. C'est magnifique ce combo! Je me sens bien à rire ainsi. J'ai l'impression de me soulager. Si seulement je pouvais entendre d'autres rires en dehors de ma pièce, je n'aurais pas l'impression que les autres sont dangereux. Parce qu'un rire, c'est joyeux, non? C'est libérateur! Pourquoi les autres dehors ne rient pas avec moi? Je suis seule à m'entendre, c'est ça? Je cesse progressivement mon rire, mais je garde le sourire. Il y a quelqu'un de l'autre côté de la porte, je vois l'ombre en dessous de celle-ci. Il y a une personne qui a entendu mon rire. Vient-il pour rire aussi? C'est vrai qu'habituellement je suis plus discrète, qu'est-ce qu'il me prend? Peut-être qu'il le sait, lui qui tourne la poignée.