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❦ Chapitre 1 : la vérité, l'âpre vérité.

Jeremiah se tenait debout dans l'encadrure de la porte. Sa mère avait oublié de la fermer et les bruits étranges qui en sortaient l'avaient intrigué. Il ne parvenait pas à les comprendre, ni à savoir si quelqu'un faisait du mal à sa mère. Le petit garçon chétif fixait le lit sans comprendre clairement la scène qui s'y produisait. Un homme râla alors. « Dis à ton taré de gamin d'aller voir ailleurs si tu veux que je te paye ! » Une femme rousse à forte poitrine, en sous vêtements se leva d'un bond, poings serrés et s'avança vers Jeremiah tandis que l'homme refermait sa braguette. Le garçon ne vit pas la main s'abattre sur sa joue, celle ci lui donna l'impression que sa tête avait trois tours. « Sâle vermine ! Dégage de là ! Tu veux me faire perdre du fric comme si c'était pas assez d'devoir te supporter ! » Elle lui empoigna le bras et le jeta hors de la chambre, se fichant royalement du fait qu'il venait de se mordre la lèvre en tombant au sol. La porte claqua et Jeremiah se retrouva dans le couloir aux couleurs glauques. Il s'essuya la bouche en grimaçant et retourna dans sa chambre. Ce n'était pas la première fois qu'il voyait un homme avec sa mère, parfois certains patientaient dans le vestibule, mais c'était la première fois qu'il voyait ce que cachait la porte. Il venait d'avoir cinq ans.

❦ Chapitre 2 :La violence aux mains du peuple n'est pas la violence, mais la justice.

Jeremiah regardait les flammes qui dansaient, comme si elles cherchaient à chatouiller les nuages. Le monstre à l'intérieur devait ressembler à steack carbonisé maintenant et cette pensée le fit sourire. Il renifla, retira sa cagoule d'une main et passa les doigts de l'autre dans ses cheveux blonds-roux. Au loin une sirène retentit, les pompiers ne tarderaient plus à venir étouffer l'incendie qui ravageaient la veille baraque. Il soupira et se faufila entre les immeubles sales, telle une ombre dans la nuit.
Le lendemain l'affaire ferait peut être la une du journal ? Les gens adoraient ce genre d'histoire où les méchants étaient punis. Après tout, ça ne faisait qu'un déchet humain de moins et une petite fille sauvée par un mystérieux justicier. Car si quelqu'un grattait un peu il découvrirait toute l'horreur que la maison en ruines dissimulait. Jeremiah le savait, lui. Il avait profilé l'homme pendant des semaines, jusqu'à ce qu'il trouve la baraque... et les restes des gamines déterrés par les chiens errants. Là il n'eut plus aucun doute, ni pitié. C'est ce jour là qu'il bascula dans la folie, véritablement.
Lorsque l'homme était arrivé avec sa nouvelle victime, l'adolescent l'attendait. Il était bien plus grand que lui mais Jeremiah avait une telle rage qu'il parvint à le maîtriser rapidement. D'abord il lui balança un énorme coup dans les tibias à l'aide d'une barre en fer. CRACCCCCC ! La gamine était inconsciente et tandis que la pourriture gémissait, il la sortit pour éviter qu'elle ne voit ce qu'il allait lui faire. L'adolescent était agressif, violent, bientôt sadique mais jamais il ne souhaiterait voir souffrir un enfant par sa faute.
De retour dans la baraque, l'homme hurlait au secours. Jeremiah lui brisa les bras pour l'empêcher de ramper, après quoi de ses doigts gantés, il le choppa par le menton. « Pitié ! Je suis malade... » Les pupilles de l'adolescent se rétrécirent et il répondit d'une voix rauque qui ne semblait pas lui appartenir : « Moi aussi, à ce qu'on dit. » D'un geste vif et sec il lui arracha la langue, le laissant agoniser dans une mare de sang, s'étranglant à moitié avec son propre liquide vital. La tête penchée sur le côté, il resta immobile une dizaine de secondes puis se redressa et s'empara des bidons d'essence qu'il avait emporté. Il en déversa le contenu dans toute la pièce sous le regard bientôt vitreux de l'ordure qui gisait au sol. Il jeta les bidons et se dirigea vers la sortie d'où il craqua une allumette...

❦ Chapitre 3 : Dans toute relation où deux personnes se fondent en une seule, le résultat final est deux demi-personnes.

« Laisse moi ! Sors de ma tête ! » La voix se tut enfin. Jeremiah ferma les yeux. Il sentait toujours sa présence mais au moins il ne l'entendait plus ! Elle raisonnait dans sa tête depuis des années, il n'en pouvait plus. Parfois même il croyait ne plus contrôler son corps, comme s'ils ne faisaient plus qu'un. Comme un soir où il buvait comme un trou avec un ami sur les marches de sa petite maison. Il s'était relevé et la tête lui tournait comme jamais. D'accord il était saoul mais quand même. Puis il avait eu un mal de crâne pas possible et l'impression qu'on faisait jongler ses organes. Il avait vomi et son ami avait éclaté de rire. « Alors crapule, on sait plus boire ? » Jeremiah avait gêmi et plus rien. Le lendemain il s'était réveillé dans son lit, son ami, son seul ami, l'avait couché. Et dire qu'il avait prévu de lui dire qui il était réellement... Il était le seul à ne l'avoir jamais rejeté, à lui avoir tendu la main même ! Il avait confiance en lui et sentait que c'était le moment. Mais il avait été interrompu par Daphnée qui ne supportait pas le whisky ! C'était vraiment perturbant d'avoir l'impression qu'une femme vivait en lui, et la cohabitation n'était pas toujours simple ! Même si elle semblait le connaître comme quiconque et savait tout de lui. Truc de fou, non ? Enfin... Il faut faire avec !

❦ Chapitre 4 : Un visage est-il un masque de comédie posé sur la tragédie de l’âme ?

Jeremiah ne savait toujours pas comment expliquer pourquoi le scan ne dévoilait pas ses sombres secrets. Daphnée avait une idée toute faite à ce sujet : « Parce que tu ne tues pas les innocents. T'es un mec bien, Jerem'. » Mais biensûr ! Il avait plus de sang sur les mains qu'un boucher mais à part ça c'était un mec bien. « J'crois plutôt que c'est toi qu'ils voient ! Parce que moi, si je m'écoutais vraiment je buterais pas que ceux de ma race ! » Il haussa les épaules, ou Daphnée. C'était encore un de leurs débats sans fin et dans le fond : quelle importance ? Un jour le scan verrait, il en était persuadé. C'est pourquoi, le parano limite associal qu'il était, se contentait de rester invisible aux yeux des autres. Au pire il était le mec poli et attentionné qui permettait aux familles en deuil de dire un dernier au revoir à leurs proches. Il était aussi, du coup, le genre de mec qu'on a pas trop envie de fréquenter tant son boulot est glauque. Ca lui allait bien car de toute façon il ne savait pas se comporter avec les autres. Il n'était jamais à l'aise, il avait peur de faire un faux pas ou que quelqu'un sache voir derrière le masque. Alors comme dirait l'autre : pour vivre heureux, vivons cachés ! Lui et son autre restaient à l'écart autant que faire se peut parce que complètement éveillerait aussi les soupçons. Parfois donc il se laissait entrainer par son meilleur ami et essayait d'être normal.